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Déclaration de soutien aux écrivains menacés

Par Gabriel Ney et Denis Marion •  • Samedi 04/08/2007 • 1 commentaire • Version imprimable

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Nawal El Saadawi est un cas exemplaire illustrant les difficultés et les dangers de plus en plus graves et fréquents que doivent affronter, partout dans le monde, des artistes et des intellectuel(le)s. À travers Nawal, c’est pour tous ceux-là que nous nous mobilisons.

« Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit à ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre sans considérations de frontières, les informations et les idées, par quelque moyen d’expression que ce soit. »
L’article 19 de la Déclaration universelle des droits de la personne humaine est clair : aucun pouvoir politique ou religieux ne peut porter atteinte à ce principe fondamental qu’est la liberté d’opinion et d’expression. Car l’opinion ne prend son sens et ne joue son rôle dans le débat d’idées que si elle a la possibilité d’être exprimée et entendue.

Ce principe n’implique pas que toutes les opinions sont fondées et que tous les moyens d’expression sont justes ; mais le débat est là pour équilibrer ce qui doit l’être et permettre les ajustements nécessaires.
À l’aube du troisième millénaire, cette liberté d’expression est pourtant toujours menacée, aux quatre rondeurs de l’humanité, et notre histoire contemporaine foisonne de condamnés, parfois à mort, pour avoir pensé ou s’être exprimé « librement » :
* En France, Boris Vian (1920-1959), censuré et victime des foudres de la presse pour son roman J’irai cracher sur vos tombes et sa chanson « Le déserteur » ;
* En Chine, Lao Che (1899-1966), « suicidé » lors de la révolution culturelle ; Au Soudan, Mahmoud Mohamed Taha, pendu en 1985, alors qu’il était âgé de plus de 80 ans, pour avoir écrit un livre sur l’Islam où il défendait l’idée de séparation entre le politique et le religieux ;
* En Arabie Saoudite, le poète Sadiq Melallah décapité, en 1992, au sabre pour crime de blasphème et d’abjuration ;
* En Égypte, la même année, l’écrivain Farag Foda, déclaré « apostat » par l’université El Azhar, est criblé de balles, au Caire, par des fanatiques religieux. En 1994, son compatriote Naguib Mahfouz, prix Nobel de littérature en 1988, sera poignardé et grièvement blessé ;
* En Turquie, en 2006, la romancière Elif Shafak est traînée devant le tribunal pour son roman Le père et le bâtard, dans lequel elle évoque le génocide arménien. Orhan Pamuk le sera pour la même raison, et choisira l’exil.

Ajoutons Garcia Lorca, Jean Sénac, Pablo Neruda, Omar Benjelloun, Salman Rushdie, Taslima Nasreen, Tahar Djaout, Leyla Othman, Hrant Dink… La liste des écrivains assassinés ou poussés à l’exil est interminable. Dans certains pays, cette censure prend les formes les plus violentes ; dans d’autres, apparemment démocratiques, elle se développe insidieusement, parfois sous la forme d’une autocensure pratiquée par les auteurs eux-mêmes.

Aujourd’hui, c’est le tour de Nawal El Saadawi, écrivain et militante des droits de la femme en Égypte. Son combat dépasse le cadre de son pays et de sa religion. Emprisonnée sous Sadat, accusée d’apostasie à deux reprises, elle a vu certains de ses textes détruits, lors de la récente Foire du Livre du Caire, et son éditeur a été menacé. Plus particulièrement visée, sa pièce « Dieu démissionne de la réunion au sommet » a fait l’objet d’une condamnation par l’université al Azhar qui, se faisant, se substitue au pouvoir judiciaire de son pays et contrevient ainsi, non seulement à l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, mais aussi aux principes de fonctionnement de tout État démocratique.
Nawal a depuis été contrainte de s’éloigner temporairement de son pays et de sa famille.

Les signataires de cette pétition demandent au gouvernement égyptien de tout mettre en œuvre pour que soient respectés les principes fondamentaux de la liberté d’opinion et d’expression dans leur pays, non seulement pour Nawal El Saadawi, mais également pour tous les citoyens égyptiens.

Au-delà du cas personnel de Nawal El Saadawi, les signataires exhortent les gouvernements de tous les pays à défendre ces principes, aujourd’hui sans cesse plus menacés partout, y compris dans les démocraties occidentales, tant dans leur propre État que dans le reste du monde, à travers les institutions internationales auxquelles ils collaborent ou les contacts diplomatiques privilégiés qu’ils entretiennent avec des États où ces droits fondamentaux sont quotidiennement bafoués.
Ils s’engagent également, à leur niveau, à tout faire pour défendre ces principes fondamentaux de liberté d’expression.

Consultez le site du Comité de soutien et signez la pétition.

Commentaires

Liberté d'opinion ... quand elle va dans le sens de notre histoire ? par L'épine dans le pied le Dimanche 05/08/2007 à 16:57

Nos pays, donneurs de leçons aux autres, sont-ils réellement les défenseurs de la liberté de pensée et de la liberté de l'écrire ?

Le racisme est réprimé par la loi Moureaux, on peut ne pas aimer les noirs, les juifs, les arabes, les homosexuel(le)s les flamands ou les wallons mais on ne peut l'exprimer publiquement .... (erratum : on peut écrire qu'on n'aime pas les flamands ou les wallons).

La vente d'objet nazis est formellement interdite dans la plupart des pays de l'Union et punissable d'embastillage.

Le négationnisme du génocide juif peut être puni de prison, le négationnisme du génocide arménien peut signer l'arrêt de mort politique d'un élu tandis qu'il reste permis de nier le génocide cambodgien ou le génocide des amérindiens d'une ampleur inégalée en terme de pourcentage de la population. Même les millions de morts de la Révolution Culturelle chinoise ou les millions de déportés par les sbires staliniens n'ont droit à une telle protection légale.

Le prosélitisme vis-à-vis de la consommation de drogue, même douce, est rigoureusement interdite selon la loi française mais on peut faire l'éloge d'un grand crû classé.

Faire de la publicité pour le tabac, même à titre privé, est interdite dans quasiment toute la CEE tandis qu'il est acceptable de faire la publicité des plus fortes des boissons alcoolisées.

La possession d'images à caractères pédophiles est pourchassées vigoureusement à travers le monde mais on peut acheter librement le roman Lolita de Vladimir Nabokov dans toute bonne librairie. 

Il en existe même qui voudrait supprimer la liberté de publicité pour les vols Low-cost ou les 4X4, même utilitaires. 

Cette liste est hélàs loin d'être exhaustive, les exemples sont nombreux dans notre société.

Je tiens à préciser à ceux qui ne me connaissent pas que je ne suis ni raciste, ni négationniste, ni néo-nazis ni pédophile, que je ne prend pas de week-ends en Espagne avec Ryan Air et que j'apprécie un bon bourgogne ou un bon Armagnac. Je suis par contre un admirateur du propos Voltairien "Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous ayez le droit de le dire" et probablement autant libertin que libertaire.

Dans nos pays, certaines opinions fausses ou à contre-courant de l'histoire peuvent valoir des peines allant jusqu'à plusieurs années de prisons. Celà ne justifie bien sûr pas de ne pas lutter pour plus de liberté dans d'autres pays mais lorsqu'on se veut un exemple pour autrui, on prête facilement le flanc à la critique lorsqu'on n'est pas droit dans ses bottes.

Lorsque les USA justifient la guerre en Irak par la soi-disant promotion de la démocratie au Moyen-Orient, il me revient une phrase sortie d'une chanson de la comédie musicale HAIR : de riches blancs envoient des pauvres noirs combattre des jaunes pour défendre une terre qu'ils ont volés au rouges.