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Moment autobiographique

Par Denis Marion et Gabriel Ney •  • Lundi 28/11/2005 • 0 commentaires • Version imprimable

Parfois, j’aimerais poser certaines questions.
Mais les personnes à qui je voudrais les poser m’intimident ou les circonstances m’en empêchent.
(les lieux souvent jouent un rôle)
Vous avez certainement connu cela. Moi, encore tout récemment, il y a quelques heures à peine, je l’ai encore vécu.

Je voyais sur le visage de quelqu’un que j’aime bien, peu importe pourquoi et comment, une mine renfrognée ou un air fâché et j’aurais voulu en connaître la cause.
Le plus simple aurait été de l’interroger et pourtant je ne le fis pas.
Pourquoi ?
Beaucoup de choses peuvent m’en empêcher.

Il y a d’abord cette faiblesse courante de croire que je suis responsable de l’état des autres, que je peux être quelque chose dans leur vie. C’est me donner beaucoup plus d’importance que j’ai réellement.
Pourtant, je me demande ce que j’ai pu faire ou dire qui pourrait être une cause quelconque au visage triste de quelqu’un que j’aime bien.
Faiblesse peut-être du poète qui sent des choses mais qui ne sait pas prendre ses distances avec ses sensations.

Par ailleurs, si avec certains, il semble facile de demander ce qui ne va pas, avec d’autres, le pas est difficile à sauter.
Il y a là une sorte de timidité qui m’empêche de poser une quelconque question alors que cela m’est naturel d’habitude. Des mésaventures où l’on m’a reproché d’être un « cambrioleur de l’âme » pourraient être à la base de cette réserve inhabituelle.
Les gens ne voient pas la nécessite de me raconter leur vie. Pourquoi d’ailleurs le feraient-ils ? Ils n’ont pas envie de terminer en poème, même totalement anonyme.

Quand je ne connais pas encore réellement quelqu’un, quelqu’un que je ne voudrais pas choquer, peiner ou déranger, pour qui j’ai une certaine amitié ou un certain respect, je reste parfois excessivement prudent.
Je garde alors cette double souffrance, d’abord de voir l’autre souffrir (en tout cela me semble comme tel) ensuite de ne pas savoir pourquoi il souffre.

Certes, tout cela me permet toujours d’imaginer l’un ou l’autre texte mais bon.

Peut-être devrais-je m’en moquer mais cela n’est pas, m’a-t-on souvent dit, dans mon caractère.

Alors, j’attends. J’attends le moment de poser ma question, en sachant sans doute que le bon moment n’existera pas.
Ou alors, j’espère que la personne me dira ce qu’elle ressent.

Pendant ce temps-là, les jours me paraissent amers.

Est-on stupide parfois ?